VHP6U4 (2017-2018) : Philosophie antique et médiévale 2, L3, S6 (A. Macé et L. Mariat)

Philosophie ancienne des pratiques

Arnaud Macé et Lora Mariat

Résumé

Ce cours a pour but de parcourir les concepts fondamentaux d’une philosophie des pratiques telle qu’elle s’est développée chez les philosophes de l’Antiquité. Les grecs n’ont cessé d’interroger la diversité de leurs pratiques, pratiques religieuses, rituelles, “artistiques”, sexuelles, politiques, techniques, agricoles, militaires – pratiques sociales en général. Ils ont pour ce faire produit de nombreux concepts : praxeis (pratiques, activités), epitêdeumata (occupations, conduites),  ethê (habitudes), ethismata (usages), nomima (coutumes), homiliai (fréquentations), etc.

À  propos de cette diversité des pratiques ils ont posé des questions ontologique (quel est le mode d’être des pratiques ?), des questions épistémologique et éthiques : agit-on bien en agissant comme on agit? Ce bien agir, c’est la question rectitude de l’acte, indissolublement technique et morale. Cet aspect « moral » est en effet, dans leur réflexion, indissociable de l’aspect que l’on pourrait appeler épistémologique, celui par lequel on se demande si chacun sait véritablement faire les choses qu’il fait, si sa pratique est fondée sur un savoir faire qui en garantit le succès. Platon, tout particulièrement – mais il fut en cela une inspiration ou une question pour toute l’Antiquité – a soulevé l’hypothèse que toute forme de rectitude morale (avoir bien ou mal agi, conformément au vice et à la vertu) puisse être en dernière instance une affaire de savoir faire, de compétence mise en oeuvre dans l’action, que le concept de tekhnê (art, savoir faire) sert à désigner. L’art peut être défini, à partir de l’Ion de Platon, comme le mode de présence du savoir ou de la science (epistêmê) au sein des pratiques. Ainsi les artisans et les hommes de l’art, charpentiers, médecins ou pilotes de navire attestent de l’effet qu’à le savoir, ou le savoir, lorsqu’il se rend présent dans la sphère des pratiques et permet à chacun de savoir ce qu’il à faire et de le faire sans défaillir, dans la certitude de savoir faire ce qu’il faut pour atteindre son but. La philosophie ancienne des pratiques consiste peut-être à s’être demandé ce qui, dans nos pratiques, était susceptible de prendre la consistance d’une action fondée sur la science, et d’avoir interrogé les conséquences morale, politiques, scientifiques et cosmologiques d’une telle interrogation. Et c’est à partir de ce point de vue qu’ils se sont ouvert la voie pour interroger ce qui constitue l’architectonique des pratiques, c’est-à-dire leur façon de se constituer en un tout qui est peut-être tout simplement le social tel qu’il qu’ils en firent la première exploration.

Les cours alterneront avec les TD, une semaine sur deux.

Le CM déploiera l’ensemble des questions évoquées dans le paragraphe ci-dessus (plan sur moodle)

Le TD se focalisera sur l’étude d’une pratique spécifique, à savoir l’action volontaire chez Aristote (Éthique à Nicomaque, III, 1-7). Outre l’effort de rationalisation exemplaire dont témoigne ce texte, sa lecture permet, plus largement, de s’interroger sur la place spécifique de la philosophie des pratiques dans la classification des sciences et des savoirs chez Aristote, d’aborder les différentes notions centrales de l’éthique aristotélicienne, et de retracer l’élaboration progressive d’une catégorie philosophique fondamentale (la notion de volonté) dans son histoire longue.

Ce cours constitue une initiation à la recherche, son évaluation prendra la forme d’un travail personnel d’approfondissement, sous la forme d’un mini-mémoire ou d’une intervention en classe, centré autour d’une pratique ou d’un champ de la pratique, à travers la réflexion des Anciens.