Argument du colloque « Quelles plantes sommes-nous ? » (Saline royale, 24-25 octobre 2020)

Argument

Quelles plantes sommes-nous ? Les plantes vivent, nous vivons : partageons-nous avec elles certaines façons de vivre ? Y a-t-il certains aspects de notre vie – de notre nutrition à notre croissance, de notre reproduction à notre dégénérescence, de notre manière de nous immerger dans le monde, d’y respirer ou d’y penser – qui soient comparables à la manière dont les plantes vivent ? Y a-t-il une forme de vie commune entre la plante et l’homme ? Qu’y a-t-il de végétatif dans l’homme ? Cette question traverse l’histoire de la médecine, qui recourt au règne végétal aussi bien pour des raisons pratiques que théoriques. D’un point de vue pratique, les plantes servent de réservoir pour constituer une diététique et une pharmacologie, qui permettent de comprendre et favoriser les interactions entre le végétal et l’homme. D’un point de vue épistémique, le végétal offre des modèles ou des analogies pour penser la vie humaine à travers ses phénomènes de nutrition, croissance, régulation,métabolisme, reproduction, mort ou immunité. Peut-on aller plus loin et considérer certains types de fonctionnements organiques chez l’homme comme végétatifs ? De fait, les analogies entre le corps humain et le règne végétal ont joué un rôle structurant dans le développement des savoirs ayant la vie ou la santé pour thème. Plus fondamentalement, ces analogies traduisent sans doute une unité de la vie sous la diversité de ses formes. Dans ce cas, il faut admettre une univocité de la vie végétative dans la plante ou chez l’homme en la thématisant comme le phénomène central de toute vie. L’ontologie de la vie végétative permettrait alors de comprendre en quoi nous partageons effectivement une vie commune avec les plantes au sein d’un écosystème et en quoi la préservation de la vie humaine nous oblige à ressaisir la vie comme un phénomène plus global partagé avec les végétaux. Ce colloque propose de repérer et analyser des catégories scientifiques et anthropologiques mobilisant le végétal pour expliquer la vie humaine. Y a-t-il une ontologie commune à l’homme et la plante, qui s’exprime par exemple à travers les catégories cliniques ou anatomiques d’âme, fonction, état ou système végétatif ? Quelles formes ou fonctions vitales les humains et les plantes partagent-ils? Ce travail de repérage épistémique et d’analyse conceptuelle ouvrira des pistes pour comprendre comment (mieux) reconnaître les plantes comme partenaires de vie et d’interactions sociales.Ce projet s’ancre dans des recherches menées au long cours par le laboratoire Logiques de l’Agir sur le soi-disant partage entre nature-société pour interroger les configurations,déplacements et réinvestissements de cette césure. En 2019, un congrès a traité des modèles et analogies botaniques en médecine et un autre congrès pluridisciplinaire a interrogé la catégorie d’état végétatif. Le congrès 2020 «Formes de vie partagées entre l’homme et la plante» poursuit cette investigation dans le cadre d’un partenariat avec la Saline royale d’Arc-et-Senans. Ce partenariat traduit la quête d’une cité idéale capable de penser et pratiquer des relations équilibrées et justes entre l’homme et la nature, capable de faire dialoguer politique et nature, sciences humaines et sciences de la nature, à l’image du cercle immense dont la Saline a entrepris l’achèvement.

Programme du colloque