Présentation
L’éthique animale, c’est-à-dire la réflexion sur l’étendue et la nature de nos obligations morales envers les animaux non-humains, ainsi que le statut éthique et les droits de ces derniers, a vécu un tournant au cours de la deuxième moitié du xxe siècle. La philosophie, au moins depuis Pythagore, s’est intéressée à notre rapport aux animaux. Cependant, les transformations de nos relations aux animaux et des modes de leur exploitation permises par le progrès technologique des pays industrialisés, et en particulier l’apparition de l’élevage intensif, ont donné à cette question une tout autre ampleur. En parallèle, l’émergence d’associations de protection des animaux, dont les revendications se sont faites de plus en plus claires, a suscité une remise en question de plus en plus fondamentale du traitement des animaux dans les sociétés occidentales.
C’est dans ce contexte que Peter Singer publie en 1975 la première édition de La libération animale. Mais si cet ouvrage marque un tournant, ce n’est pas tant parce que ses positions auraient fait l’unanimité parmi les défenseur·euse·s des animaux que pour les questions qu’il ouvre, en particulier au travers de sa critique du spécisme (c’est-à-dire des discriminations fondées sur le critère de l’espèce), qui a exercé une influence considérable. La philosophie morale a eu tôt fait de réinvestir ce champ de réflexion et des alternatives à la position utilitariste de Singer ont rapidement été proposées, les plus connues étant la position déontologiste tenue par Tom Regan, puis Gary Francione, et l’éthique des vertus de Martha Nussbaum ou Corine Pelluchon. Ce champ s’est depuis ouvert à de nouvelles perspectives et ses questionnements ont convergé avec d’autres mouvements comme le féminisme (notamment à travers les travaux de Carol Adams et Josephine Donovan), le décolonialisme ou, d’une manière plus contestée, l’écologie ; les réflexions qu’il porte ont rencontré le champ de la théorie politique (Sue Donaldson et Will Kymlicka) et de la phénoménologie (Florence Burgat) ; plus récemment encore, de nouveaux problèmes comme celui de la souffrance des animaux sauvages ont été mis en avant et de nouvelles approches ont été développées, comme l’altruisme efficace animalier. Plus généralement, le cas de l’exploitation animale est aussi l’occasion de réfléchir à des problèmes fondamentaux touchant à l’éthique des populations, l’évaluation de la responsabilité collective, la relation entre agentivité et passivité morales, la notion de contrat social, etc.
Comme ce bref aperçu le laisse entendre, l’éthique animale est un domaine de réflexion d’une grande richesse et en plein développement : il est pourtant encore mal connu et peu enseigné dans le supérieur. Cet atelier de lecture, ouvert à tout le monde, quels que soient son statut au sein de l’université, sa discipline d’origine ou ses opinions personnelles sur le sujet, sera l’occasion de lire et de réfléchir collectivement à des grands textes de l’éthique animale contemporaine, français ou traduits en français.
Après une première année consacrée à La politique sexuelle de la viande de Carol Adams, un sondage est actuellement en cours pour décider de l’ouvrage qui sera lu lors de la deuxième année (2024-2025) : lien d’accès au sondage. Merci de ne répondre à ce sondage que si vous envisagez de participer ; vous avez jusqu’au vendredi 11 octobre pour le remplir.
Les réunions de cet atelier consisteront en la présentation d’un chapitre par l’un·e d’entre nous, suivie d’une discussion collective. Au premier semestre, nos séances auront lieu le jeudi, 17h-18h30, salle B16, les jeudis 17 octobre, 7 et 21 novembre et 5 décembre.
Informations et inscription à la liste de diffusion :
etienne[POINT]menard[AT]univ-fcomte[POINT]fr