Le laboratoire Logiques de l’Agir a le plaisir de vous convier à la sixième séance doctorale de son séminaire le mercredi 1er décembre 2021 de 18h00 à 20h00, en salle E14 (Grand Salon), entrée par le 18 rue Chifflet, 25000 Besançon. Cette séance sera accessible en visioconférence sur demande en écrivant à arnaud[point]mace[at]univ-fcomte[point]fr
Interviendront : Céline Marty et Marion Farge.
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Céline Marty : André Gorz : une philosophie de l’autogestion
Résumé
Ma thèse propose une nouvelle interprétation du corpus de la philosophie du travail et de l’écologie politique d’André Gorz. Aujourd’hui connu pour ses thèses des années 1980 qui soutiennent une critique radicale du travail, sur le plan théorique, et une réduction du temps de travail et du revenu universel, sur le plan pratique, pour construire l’émancipation vis-à-vis du travail marchand, jugé toujours hétéronome, il est parfois caricaturé comme un penseur qui aurait délaissé le problème du travail lui-même et ses luttes en faisant ses “Adieux au prolétariat” en 1980.
Or, je montre qu’avant ces prises de position des années 1980, Gorz s’intéresse de près à l’autogestion, qu’il thématise comme une “réforme révolutionnaire” à même de transformer radicalement l’organisation du travail et de la société. Cet intérêt thématique se comprend notamment par son double héritage sartrien et marxien. S’il abandonne l’idéal d’autogestion strictement productive à partir des années 1980, il ne le délaisse pas mais le transforme en idéal d’ “autogestion généralisée de la vie” qu’il met au coeur de son projet écologique.
Rendre compte de sa théorie de l’autogestion productive des années 1970 et des raisons qu’il le pousse progressivement à l’abandonner comme seule perspective d’émancipation permet aujourd’hui de dialoguer avec les théories actuelles de la “démocratisation du travail”. Les recherches historiques et sociologiques récentes sur l’autogestion permettent à la fois de comprendre le contexte de l’émergence de la théorie gorzienne de l’autogestion et d’actualiser ses intuitions sur de nouveaux terrains. Sa théorie écologique autogestionnaire fournit aussi des idées à l’écosocialisme autogestionnaire contemporain.
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Marion Farge : La psychanalyse et le pouvoir : Foucault, Deleuze et Guattari
Résumé
Au moment où la psychanalyse gagne en France une influence grandissante et largement renouvelée par l’enseignement lacanien, Deleuze et Guattari d’un côté, Foucault de l’autre, proposent un retour critique sur le pouvoir que continue d’exercer cette dernière, là même où elle se prétend libératrice. Or, une telle critique engage, pour Foucault comme pour Deleuze et Guattari, une réévaluation de la notion même de pouvoir : celle-ci désigne alors non seulement la mainmise qu’exerce de fait, à un moment donné, une discipline particulière sur un champ déterminé ; mais également la structuration, par cette discipline, du champ en question et de l’individu qu’elle se donne pour cible. Une telle approche explique que la psychanalyse, loin de pouvoir se constituer en outil de lutte contre le pouvoir psychiatrique, en devienne le meilleur relai.
Il s’agit, dans le cadre de cette présentation, de retracer la genèse de cette réévaluation du pouvoir. Nous montrerons, en particulier, que celle-ci suppose un dialogue serré de Deleuze, Guattari et Foucault avec le dispositif psychanalytique, comme avec l’institution psychiatrique et le savoir psychologique. Elle engage en outre des divergences entre Foucault d’une part, Deleuze et Guattari d’autre part, touchant l’articulation entre le pouvoir ainsi considéré et le sujet qu’il secrète. À partir de cette étude, l’ambition est de relever quelques enjeux résultant des hypothèses de ces auteurs, y compris pour penser l’actualité du champ psychologique, psychiatrique et psychothérapeutique.