Penser la crise écologique
Guillaume Méjat
Résumé :
Dès le moment où elle est devenue un objet philosophique, la crise écologique a été considérée comme étant l’ultime manifestation d’une autre crise : celle du cadre conceptuel que nous ont légué les « Modernes », c’est-à-dire les philosophes de l’âge classique. Des travaux des précurseurs comme Aldo Léopold ou Hans Jonas aux recherches les plus contemporaines, la crise environnementale a effectivement toujours été considérée comme ayant son origine dans un rapport au monde qui s’est élaboré au tournant de la Renaissance et du dix-septième siècle et qui a été théorisé par les scientifiques et les philosophes de l’époque moderne. L’ambition de ce cours est d’introduire, en s’arrêtant sur quelques-uns des lieux importants de la constitution d’une philosophie environnementale, à la compréhension des raisons précises de cette accusation. Un premier temps sera consacré aux tentatives d’élaboration d’une éthique environnementale. Il s’agira, en s’arrêtant plus particulièrement sur l’œuvre de Jonas et sur l’environnementalisme américain, de voir comment ces éthiques entrent en débat avec la morale kantienne. Un deuxième temps sera consacré à des travaux dans lesquels ce n’est plus seulement la morale des Modernes qui est mise en cause, mais leur ontologie et la distinction entre nature et culture sur laquelle elle se fonde. Ce sera l’occasion pour nous de lire des textes de Philippe Descola, Bruno Latour et Baptiste Morizot. Un troisième et dernier temps sera consacré à la façon dont la philosophie marxiste s’est emparée de la problématique écologique et a compris la crise environnementale comme ayant pour cause un mode de production qui a commencé à s’imposer à l’aube de la modernité : le capitalisme. Il s’agira alors de se demander s’il n’est pas pertinent de parler de Capitalocène plutôt que d’Anthropocène.
Bibliographie :
Cette bibliographie indique les principaux ouvrages sur lesquels le cours s’appuiera. Les extraits plus précisément étudiés en cours seront contenus dans un exemplier distribué lors de la première séance et disponible en version numérique sur Moodle.
John Baird Callicott, Éthique de la terre, Wildproject, collection « Domaine sauvage », 2021
Philippe Descola, Par-delà nature et culture, Gallimard, collection « Folio essais », 2015
Friedrich Engels, Dialectique de la nature, Éditions sociales, 1968
John Bellamy Foster, Marx écologiste, Amsterdam, 2011
Hans Jonas, Le Principe responsabilité : une éthique pour la civilisation technologique, Flammarion, collection « Champs essais », 2013
Hans Jonas, Essais philosophiques : du credo ancien à l’homme technologique, Vrin, collection « Bibliothèque des textes philosophiques », 2013 (en particulier les chapitres 1 et 3 de la première partie)
Bruno Latour, Nous n’avons jamais été modernes : essai d’anthropologie symétrique, La Découverte, collection « Poches Découverte », 2006
Bruno Latour, Face à Gaïa : huit conférences sur le nouveau régime climatique, La Découverte, 2015
Aldo Léopold, Almanach d’un comté des sables, Flammarion, collection « GF », 2017
Andréas Malm, L’Anthropocène contre l’histoire : le réchauffement climatique à l’ère du capital, La fabrique, 2017
Baptiste Morizot, Les Diplomates : cohabiter avec les loups sur une autre carte du vivant, Wildproject, collection « Domaine sauvage », 2016
Baptiste Morizot, Manières d’être vivant : enquêtes sur la vie à travers nous, Actes Sud, collection « Mondes sauvages », 2020