Y4HPH6U4 (2024-2025) : Philosophie antique et médiévale 2, L3, S6 (A. Macé)

Y4HPH6U4 Philosophie antique et médiévale 2, L3, S6 (A. Macé)

Philosophie ancienne des pratiques

CM, Arnaud Macé

L’idée républicaine dans l’Antiquité

Le terme de « république » vient du latin res publica, qui signifie littéralement la « chose publique », c’est-à-dire celle qui appartient à tous, par opposition à la chose privée qui n’appartient qu’à quelqu’un en particulier (ou encore, pour les romains, à la chose qui n’appartient à personne, res nullius). Il n’y a de « chose publique » que pour autant qu’un collectif se donne quelque chose en commun, un bien commun. C’est peut-être la raison pour laquelle l’histoire des idées politiques a opposé la République à la Monarchie, car on voulait ainsi désigner un état de la communauté politique dans lequel le pouvoir est à la charge de la communauté elle-même et de ses membres, et non transmise héréditairement à celui ou celle qui en hérite. Mais alors, que faut-il que l’on mette en commun pour qu’il y ait une « chose publique » ? Suffit-il de répondre : le pouvoir ? On risque alors de confondre la république avec la démocratie, qui désigne le fait que le peuple exerce le pouvoir, ce que l’on peut tenir pour l’équivalent de « tous » ou au moins d’un grand nombre (le terme grec dêmokratia désigne le fait que le pouvoir, kratos, appartient au dêmos, le peuple). Le peuple est certes un collectif qui peut se donner une chose commune. La démocratie est donc, en un sens au moins, une « république », pour autant qu’elle suppose que l’on mette en commun, entre tous les membres d’un collectif, cette chose qu’est le pouvoir. Mais la question de la « république » suppose peut-être en retour qu’afin de pouvoir partager le pouvoir, il faille partager davantage que le pouvoir. Qu’est-ce qu’il faut mettre en commun au-delà du simple pouvoir, pour qu’un collectif soit effectivement en mesure d’en faire bon usage ?

Pour ouvrir cette question, il faut remonter plus loin que Rome. La res publica des romains traduit en effet la politeia des Grecs. Le terme désigne la constitution de la cité, mais en un sens concret de distribution des prérogatives au sein de la cité. Or, si l’on ouvre l’ouvrage le plus célèbre portant ce titre, la République de Platon (le terme latin s’est imposé pour traduire l’original grec qui a pour titre la Politeia), on découvre que la distribution définie par la « politeia » concerne des types de choses très diverses. Platon semble en effet estimer que pour véritablement constituer une communauté politique, ce que nous pouvons appeler une république, il faut partager un large éventail de choses : non seulement l’expérience de prendre en charge tel ou tel aspect de la vie communautaire, notamment l’expérience de la guerre, mais aussi plus généralement des sentiments, des mœurs, des habitudes, des croyances, et, peut-être plus étonnamment encore, partager la propriété et aussi, partager les familles (avoir les mêmes femmes et les mêmes enfants) ! On se propose d’ouvrir ainsi la question « républicaine », en interrogeant les expérimentations sociales antiques, à partir du VIe siècle avant J.-C., et en étudiant les réflexions politiques de Platon, d’Aristote et de Cicéron.

Bibliographie préliminaire.

Platon, République, Paris, Flammarion (GF).

Aristote, Les Politiques, Paris, Flammarion (GF)

[Aristote], La Constitution des Athéniens, Paris, Les Belles Lettres.

Cicéron, La République, Paris, Gallimard, 1994.

Etudes

Bourdeau, V., & Merrill, R, La république et ses démons: essais de républicanisme appliqué, Paris, Ere, 2007.

Ismard, P. et Macé, A., La cité et le nombre. Clisthène d’Athènes; l’arithmétique et l’avènement de la démocratie, Paris, Les Belles Lettres, 2024.