La vie voulue. Philosophie politique du consentement de Hobbes à la Révolution française
Julien Pasteur
Résumé
Selon une habitude dont ce cours cherchera à faire la généalogie, nous faisons du consentement l’analogue d’une évidence naturelle. Qu’il s’agisse de l’existence individuelle et privée ou de la vie collective et sociale, aucun lien ne saurait être réputé légitime sans avoir été auparavant librement consenti. Telle est, pourrait-on dire, un trait caractéristique du dispositif déployé par la philosophie politique des modernes ; là où les sociétés traditionnelles étaient essentiellement constituées par des liens hérités et subis, là où préexistait quelque chose comme une inscription hiérarchique, les hommes des sociétés contemporaines tiennent la volonté et la liberté pour les préalables sans lesquels aucune discussion n’est même possible. L’horizon et l’idéal régulateur qui paraissent nous définir renverraient donc à la vie voulue, à l’idée d’une vie intégralement choisie au sein de laquelle rien n’échapperait jamais à ce que Pierre Manent nomme « l’empire du consentement ». En ce sens, nous sommes bien les légataires des philosophies contractualistes et du jusnaturalisme, notamment de Hobbes et Rousseau. Le Léviathan et le Contrat Social ont pour point commun la reprise de fond en comble des rapports d’obéissance, de promesse et d’obligation. A partir de la lente déconstruction du schème théologico-politique, comment et par quoi garantir ce qui auparavant relevait d’anciennes modalités comme le serment, la promesse ou la foi jurée ? Les notions de représentation, de souveraineté populaire, de contrat ou de volonté générale permettent-elles de contourner les apories du commandement et de l’allégeance ? Parce qu’elle a été à la fois le catalyseur et le lieu expérimental de ces questions, le cours s’attardera enfin sur la Révolution français de 1789, et particulièrement au moment de la Terreur.
Bibliographie indicative
– BERNARDI, Bruno, Le principe d’obligation, Vrin/EHESS.
– CHODERLOS DE LACLOS, Pierre, Les liaisons dangereuses, GF.
– HABIB, Claude, Le consentement amoureux, Hachette/Pluriel.
– HOBBES, Thomas, Léviathan, trad. G. Mairet, Folio.– NAGY, Peter, Libertinage et révolution, Gallimard/Idées.
– QUINET, Edgar, Le christianisme et la Révolution française, Fayard/Corpus.
– RANCIÈRE, Jacques, La mésentente, Galilée.
– ROUSSEAU, Jean-Jacques, Contrat Social, éd. R. Derathé, Folio ; Émile, Livre V en particulier, Folio.
– TOCQUEVILLE, Alexis (de), De la démocratie en Amérique, Tome II, GF.